Denis Lavant a triomphé, trois soirs durant, au théâtre Sorano, dans la peau -de vache- de Louis-Ferdinand Céline. L'écrivain (1894-1961) a mauvaise presse. Son antisémitisme virulent lui a valu une mise à l'index qui a toujours grignoté le champ de la littérature. Dans ce domaine, pourtant, l'écrivain est un génie. « Voyage au bout de la nuit » ou « Mort à crédit » ont révolutionné un genre qui ronronnait, dans une valse sombre privilégiant le rythme, le choc, la verdeur.
Céline en parlait avec une lucidité exacerbée dans une correspondance que Denis Lavant a jouée avec la force qu'on lui connaît, tour à tour vieux tigre fatigué n'en pouvant plus de donner des coups de griffe et pantin gesticulant cabotinant jusqu'à la vomissure.
Sur scène, le comédien abandonne ses frusques (gilet sur gilet), traîne la patte entre son bureau et son lit, éructe et souffre. « Ce qui compte, c'est l'émotion, pas le verbe, dit Céline. Transformer le langage parlé en mots, c'est un travail long, difficile. Ce que je veux, c'est chuchoter à l'oreille des lecteurs. Personne ne veut me croire mais écrire, c'est terrible. »
Victime de maux de tête et d'insomnies, Céline tourne en rond, se bat avec ses éditeurs, conchie le monde entier. Dans une scène hallucinante, il sort des vieux bouquins d'un carton et les balance à terre. Toute la littérature du XXe siècle subit le jeu de massacre : Sartre (« qui a appris l'existentialisme chez un philosophe nazi »), Joyce (« trop lent : un enculeur de mouches »), Aragon et même un Flaubert qu'il admire pourtant (« J'échangerai toute son œuvre contre une nageuse olympique »). On rit, jaune évidemment, subjugués par le jeu nuancé d'un Denis Lavant en état de grâce. Sous le sale type bat le cœur d'un homme.
J.-M. L.S.
La Dépêche, 19/02/2010.
Denis Lavant sera aujourd'hui samedi avec Jacques Roubert, à 18h, à la galerie le Confort des Etranges, 3, rue Mirepoix à Toulouse. Tél. 06 63 69 29 52.
>>> A lire : Denis Lavant, au bout de la nuit avec Louis-Ferdinand Céline au Sorano (La Dépêche, 17/02/2011)
Céline en parlait avec une lucidité exacerbée dans une correspondance que Denis Lavant a jouée avec la force qu'on lui connaît, tour à tour vieux tigre fatigué n'en pouvant plus de donner des coups de griffe et pantin gesticulant cabotinant jusqu'à la vomissure.
Sur scène, le comédien abandonne ses frusques (gilet sur gilet), traîne la patte entre son bureau et son lit, éructe et souffre. « Ce qui compte, c'est l'émotion, pas le verbe, dit Céline. Transformer le langage parlé en mots, c'est un travail long, difficile. Ce que je veux, c'est chuchoter à l'oreille des lecteurs. Personne ne veut me croire mais écrire, c'est terrible. »
Victime de maux de tête et d'insomnies, Céline tourne en rond, se bat avec ses éditeurs, conchie le monde entier. Dans une scène hallucinante, il sort des vieux bouquins d'un carton et les balance à terre. Toute la littérature du XXe siècle subit le jeu de massacre : Sartre (« qui a appris l'existentialisme chez un philosophe nazi »), Joyce (« trop lent : un enculeur de mouches »), Aragon et même un Flaubert qu'il admire pourtant (« J'échangerai toute son œuvre contre une nageuse olympique »). On rit, jaune évidemment, subjugués par le jeu nuancé d'un Denis Lavant en état de grâce. Sous le sale type bat le cœur d'un homme.
J.-M. L.S.
La Dépêche, 19/02/2010.
Denis Lavant sera aujourd'hui samedi avec Jacques Roubert, à 18h, à la galerie le Confort des Etranges, 3, rue Mirepoix à Toulouse. Tél. 06 63 69 29 52.
>>> A lire : Denis Lavant, au bout de la nuit avec Louis-Ferdinand Céline au Sorano (La Dépêche, 17/02/2011)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire