Le 1 juillet 1961 Céline décédait. Il était inhumé trois jours plus tard dans un caveau du cimetière de Meudon.
Ça s’est terminé comme ça, dans la discrétion. Le 4 juillet 1961, Louis-Ferdinand Céline était inhumé dans un caveau du cimetière de Meudon. Il disait adieu à un monde qu’il abhorrait, ainsi qu’au monde des lettres, pour lequel il n’avait pas plus d’affection. C’était il y a 50 ans. L’auteur de Mort à Crédit tirait timidement sa révérence, seul les plus proches étaient présents. Le parfait contraire de son entrée en littérature, qu’il avait réveillé à coup de semonce syntaxique en 1932, lors de la parution de Voyage au bout de la nuit. Depuis cette date, Céline n’a jamais cessé de contrarier, de fasciner et de choquer. Peut-être parce qu’il matérialise à lui tout seul la haine que la France porte à ses écrivains collabos. D’autant que Céline est plus connu que Brasillach ou Drieu La Rochelle.
Céline était inscrit dans le recueil des célébrations officielles
Quoiqu’il en soit, lorsqu’on évoque l’auteur, la polémique n’est jamais bien loin. Et c’est ce qui explique qu’aucune commémoration n’a été organisée pour célébrer l’anniversaire de sa mort. Régulièrement étudié au Bachot, Céline est considéré comme un génie de la littérature. Sa gouaille faussement prolétarienne et son sens de la rythmique (sa petite musique comme il l’appelait) font de lui un écrivain à part, qui n’a eu de cesse de bousculer les vieux codes littéraires. C’est sans doute pour cette raison, que Frédéric Mitterrand avait décidé de faire de l’auteur l’une des personnalités à honorer en 2011. L’écrivain était inscrit dans le recueil des célébrations officielles au côté de Blaise Cendrars, Franz Liszt ou Georges Pompidou. Mais voilà, Céline était aussi l’auteur de pamphlets antisémites ignobles. Les Beaux draps, Bagatelle pour un massacre ou l’Ecole des Cadavres lui ont valu bien des ennuis à la libération. C’est pour cette autre raison qu’en janvier dernier, Serge Klarsfeld a protesté avec véhémence contre l’initiative du ministre de la culture. Dans son sillage, l’affaire relançait le sempiternel débat sur l’homme et son œuvre. Pour certains, il y aurait-eu deux Céline : le génie et le monstre antisémite. D’autres récusent l’idée du schizophrène, qu’ils jugent simpliste.
L’homme et son œuvre sont dans tous les cas les conséquences d’un siècle que Céline lui-même détestait. Ses romans témoignent de cette haine d’une époque où la modernité et le progrès servent la guerre et la destruction. Des romans qui constituent une longue biographie de Céline et de son siècle en déliquescence. Cinquante après son décès, l’auteur continue d’alimenter les discussions et d’être le sujet d’une myriade d’analyses. Même mort, il ne laisse personne indifférent, d’une controverse l’autre. Mais c’est finalement en toute discrétion, à l’instar de l’enterrement de Meudon, qu’est passé le cinquantième anniversaire de sa disparition.
Baptiste THION
France-Soir, 5/7/2011
Ça s’est terminé comme ça, dans la discrétion. Le 4 juillet 1961, Louis-Ferdinand Céline était inhumé dans un caveau du cimetière de Meudon. Il disait adieu à un monde qu’il abhorrait, ainsi qu’au monde des lettres, pour lequel il n’avait pas plus d’affection. C’était il y a 50 ans. L’auteur de Mort à Crédit tirait timidement sa révérence, seul les plus proches étaient présents. Le parfait contraire de son entrée en littérature, qu’il avait réveillé à coup de semonce syntaxique en 1932, lors de la parution de Voyage au bout de la nuit. Depuis cette date, Céline n’a jamais cessé de contrarier, de fasciner et de choquer. Peut-être parce qu’il matérialise à lui tout seul la haine que la France porte à ses écrivains collabos. D’autant que Céline est plus connu que Brasillach ou Drieu La Rochelle.
Céline était inscrit dans le recueil des célébrations officielles
Quoiqu’il en soit, lorsqu’on évoque l’auteur, la polémique n’est jamais bien loin. Et c’est ce qui explique qu’aucune commémoration n’a été organisée pour célébrer l’anniversaire de sa mort. Régulièrement étudié au Bachot, Céline est considéré comme un génie de la littérature. Sa gouaille faussement prolétarienne et son sens de la rythmique (sa petite musique comme il l’appelait) font de lui un écrivain à part, qui n’a eu de cesse de bousculer les vieux codes littéraires. C’est sans doute pour cette raison, que Frédéric Mitterrand avait décidé de faire de l’auteur l’une des personnalités à honorer en 2011. L’écrivain était inscrit dans le recueil des célébrations officielles au côté de Blaise Cendrars, Franz Liszt ou Georges Pompidou. Mais voilà, Céline était aussi l’auteur de pamphlets antisémites ignobles. Les Beaux draps, Bagatelle pour un massacre ou l’Ecole des Cadavres lui ont valu bien des ennuis à la libération. C’est pour cette autre raison qu’en janvier dernier, Serge Klarsfeld a protesté avec véhémence contre l’initiative du ministre de la culture. Dans son sillage, l’affaire relançait le sempiternel débat sur l’homme et son œuvre. Pour certains, il y aurait-eu deux Céline : le génie et le monstre antisémite. D’autres récusent l’idée du schizophrène, qu’ils jugent simpliste.
L’homme et son œuvre sont dans tous les cas les conséquences d’un siècle que Céline lui-même détestait. Ses romans témoignent de cette haine d’une époque où la modernité et le progrès servent la guerre et la destruction. Des romans qui constituent une longue biographie de Céline et de son siècle en déliquescence. Cinquante après son décès, l’auteur continue d’alimenter les discussions et d’être le sujet d’une myriade d’analyses. Même mort, il ne laisse personne indifférent, d’une controverse l’autre. Mais c’est finalement en toute discrétion, à l’instar de l’enterrement de Meudon, qu’est passé le cinquantième anniversaire de sa disparition.
Baptiste THION
France-Soir, 5/7/2011
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire