Dans son ouvrage paru au printemps dernier, - D'un Céline l'Autre aux éditions Robert Laffont -, le biographe yvelinois de Céline, David Alliot, livre le témoignage édifiant de Madame Hubert Canale, médecin installé rue Léon-Desoyers à propos de son confrère qui tente de “percer” localement :
« En 1939, nous tenions, mon mari et moi, un cabinet rue Léon-Desoyers. Notre clientèle était plutôt modeste. Mon mari était généraliste, moi je soignais les femmes et les enfants. Mon mari avait été mobilisé dans un hôpital loin de notre domicile. Par un agent de police avec qui je discutais, j’ai appris la venue récente dans la ville d’un écrivain célèbre. Cette visite causait beaucoup de ram-dam. L’agent se plaignait d’avoir en ce moment beaucoup de travail car il devait “le surveiller”, c’était ses mots. Il ne se souvenait pas de son nom, c’était un nom de femme disait-il. Quelque temps plus tard, dans ma salle d’attente, est assis un homme de quarante-cinq ans, mal rasé, pas net. Il avait un pantalon clair et une veste mal assortie. Je l’ai fait entrer dans mon bureau. Il s’est présenté en tant que docteur Destouches, m’a expliqué qu’il venait s’installer à Saint-Germain avec sa mère. Il était recommandé par le docteur Larget, chirurgien de l’hôpital de Saint-Germain. Il proposait de venir m’aider à tenir le cabinet durant l’absence de mon mari. J’ignorais tout du passé de cet homme, mais il ne m’a pas inspiré confiance. Je lui ai expliqué que, pour l’heure, je pouvais suffire à la tâche toute seule. Je lui ai dit que je le contacterais, si je pensais avoir besoin de lui. Il m’a juste laissé son adresse, pas son téléphone. Peu de temps après ce fut l’exode. La ville venait d’être évacuée, certains médecins avaient été réquisitionnés, j’étais parmi eux et donc tenue de rester, d’assurer une permanence. Un jour, je suis allée à la mairie pour savoir si je pouvais partir, car je voulais rejoindre Limoges où mes enfants se trouvaient. On m’a dit que je pouvais m’en aller. Alors, j’ai eu l’idée de contacter le docteur Destouches pour lui proposer de tenir le cabinet durant mon absence. Je me suis rendue à l’adresse qu’il m’avait donnée. C’était une petite villa avec jardin proche du prieuré de Saint-Germain. Les volets étaient fermés, il n’y avait manifestement plus personne. » (1)
Frédéric ANTOINE, avec les conseils de David Alliot
Le Courrier des Yvelines, 24 août 2011.
Notes
(1) Témoignage écrit recueilli par Émile Brami, Céline, “Je ne suis pas assez méchant pour me donner en exemple”, Paris, Écriture, 2003, p. 206-207. A lire aussi dans l'ouvrage de David Alliot, D'un Céline l'Autre, Robert Laffont, 2011.
« En 1939, nous tenions, mon mari et moi, un cabinet rue Léon-Desoyers. Notre clientèle était plutôt modeste. Mon mari était généraliste, moi je soignais les femmes et les enfants. Mon mari avait été mobilisé dans un hôpital loin de notre domicile. Par un agent de police avec qui je discutais, j’ai appris la venue récente dans la ville d’un écrivain célèbre. Cette visite causait beaucoup de ram-dam. L’agent se plaignait d’avoir en ce moment beaucoup de travail car il devait “le surveiller”, c’était ses mots. Il ne se souvenait pas de son nom, c’était un nom de femme disait-il. Quelque temps plus tard, dans ma salle d’attente, est assis un homme de quarante-cinq ans, mal rasé, pas net. Il avait un pantalon clair et une veste mal assortie. Je l’ai fait entrer dans mon bureau. Il s’est présenté en tant que docteur Destouches, m’a expliqué qu’il venait s’installer à Saint-Germain avec sa mère. Il était recommandé par le docteur Larget, chirurgien de l’hôpital de Saint-Germain. Il proposait de venir m’aider à tenir le cabinet durant l’absence de mon mari. J’ignorais tout du passé de cet homme, mais il ne m’a pas inspiré confiance. Je lui ai expliqué que, pour l’heure, je pouvais suffire à la tâche toute seule. Je lui ai dit que je le contacterais, si je pensais avoir besoin de lui. Il m’a juste laissé son adresse, pas son téléphone. Peu de temps après ce fut l’exode. La ville venait d’être évacuée, certains médecins avaient été réquisitionnés, j’étais parmi eux et donc tenue de rester, d’assurer une permanence. Un jour, je suis allée à la mairie pour savoir si je pouvais partir, car je voulais rejoindre Limoges où mes enfants se trouvaient. On m’a dit que je pouvais m’en aller. Alors, j’ai eu l’idée de contacter le docteur Destouches pour lui proposer de tenir le cabinet durant mon absence. Je me suis rendue à l’adresse qu’il m’avait donnée. C’était une petite villa avec jardin proche du prieuré de Saint-Germain. Les volets étaient fermés, il n’y avait manifestement plus personne. » (1)
Frédéric ANTOINE, avec les conseils de David Alliot
Le Courrier des Yvelines, 24 août 2011.
Notes
(1) Témoignage écrit recueilli par Émile Brami, Céline, “Je ne suis pas assez méchant pour me donner en exemple”, Paris, Écriture, 2003, p. 206-207. A lire aussi dans l'ouvrage de David Alliot, D'un Céline l'Autre, Robert Laffont, 2011.
C'est chouette les témoignages comme ceux de Madame Hubert Canale auprès d'Emile Brami... Encore faudrait-il pousser les investigations... Ce que Madame Suzanne Canale ne lui a apparemment pas dit c'est que son mari était un franc-maçon très actif avant la guerre et un résistant très actif pendant l'Occupation, ce qui pourrait tout de même orienter un peu son témoignage de "méfiance" à l'égard du Dr Destouches, dit L.-F. Céline... à moins qu'elle n'ait pas fait le rapprochement... Mais après guerre, elle a quand même du apprendre que Destouches était Céline... Source : un livre excellent sur la ville de Saint-Germain-en-Laye, en vente dans toutes les bonnes librairies de la ville, avec adresse du dit cabinet et autres détails.
RépondreSupprimerBjr, quel est le titre de l'ouvrage svp ?
RépondreSupprimerL'ouvrage présenté en introduction ?
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