« Le meilleur d'entre nous »
J’ai rencontré Éric Mazet en 1998,
après avoir publié le premier catalogue de la librairie D’un
livre l’autre, j’étais encore libraire en chambre.
M’intéressant à Céline
depuis la toute fin des années soixante je savais évidemment qui il
était. Pour moi un nom presque mythique, celui d’un des tous
premiers chercheurs s’étant intéressé à l’auteur de Voyage au
bout de la nuit, mais aussi un de ses plus importants
collectionneurs. Je me souviens qu’à ma grande surprise il m’avait
commandé un exemplaire des Cahiers Céline, le N°3 si ma mémoire
est bonne, qu’il avait prêté et qu’on ne lui avait pas rendu.
Il m’avait proposé de me rendre chez lui, à Issy les Moulineaux
afin de le lui remettre en main propre, ce que je m’étais empressé
d’accepter.
J’étais alors un parfait
inconnu, et, d’une certaine façon, un fournisseur, ce qui ne
l’empêcha pas de me recevoir avec la courtoisie de l’homme bien
élevé et respectueux des autres qui est la sienne, mais aussi avec
une vraie gentillesse à laquelle rien ne l’obligeait. Nous avons
bavardé longtemps, il me montra une petite partie de ses trésors,
nous avons sympathisé. Lorsque l’année suivante je m’installai
dans le minuscule local de la rue Bréa, il prit l’habitude de me
rendre des visites régulières. Les conversations nombreuses que
j’avais avec lui étaient toujours un véritable plaisir tant elles
alliaient la connaissance encyclopédique de Céline à une réelle
modestie, modestie qui, d’ailleurs, lui a beaucoup nuit : nul
n'ignore qu’Eric Mazet n’a pas la place qu’il mérite parmi
cette étrange confrérie que l’on appelle les céliniens qui tous,
directement ou indirectement, lui doivent peu ou prou. Pour ma part,
chaque fois que j’avais un renseignement à lui demander, qu’il
soit d’ordre biographique ou bibliographique, il ne me refusait
jamais son aide, prenant toujours le temps d’une recherche
méticuleuse afin de me donner une réponse aussi précise et
argumentée que possible. Je lui ai soumis les manuscrits des deux
livres que j’ai écrit sur Céline : les critiques ou les
corrections qu’il me suggéra furent toutes constructives et
pertinentes. Alors que je terminais Céline, Hergé et l’affaire
Haddock, sans que je lui demande rien, il me signala qu’à sa
connaissance le nom de Tintin n’apparaissait qu’une fois dans la
correspondance de Céline, dans une lettre inédite à Henri Mahé
qui était en sa possession. Il m’en fit parvenir une photocopie
dont il m’autorisa à publier une phrase, Mon cher Tintin, en
fac-similé. J’ai eu aussi la chance de travailler avec lui sur
l'édition des Lettres à Antonio Zuloaga et ce fut pour moi un
bonheur que nous déchiffrions ensemble cette correspondance qui
venait de resurgir.
Éric n’aime pas les compliments, je
dois pourtant lui dire, puisque l’occasion m’en est donnée ici,
combien je regrette qu’il se soit retiré dans cette lointaine
province où je vais le voir de temps à autre et combien ses visites
me manquent. Mais, je regrette surtout qu’il se refuse à écrire
cette biographie de Céline qu’il porte en lui et qu’il nous
doit.
Pour conclure, je reprendrai cette
phrase célèbre : il est, à mes yeux, pour d’innombrables
raisons :
Le meilleur d’entre nous.
Émile BRAMI, juin 2012.
« Éric Mazet, célinien émérite »
C’est à la fin des années 70 que j’ai fait la connaissance d’Éric Mazet. Grâce à l’une ou l’autre bibliographie célinienne, je savais qu’il était l’auteur d’un mémoire de maîtrise fondateur, « La Déformation du réel dans trois oeuvres de Céline, d’après des documents inédits », soutenu en 1971 à la Sorbonne. Soit quelques années avant le renouveau des études céliniennes dû au « canal historique » Dauphin-Alméras-Godard-Gibault. C’est, en effet, à la fin des années 70 que surgit la floraison des Cahiers Céline, de l’Album Pléiade, du premier tome de la biographie de François Gibault, et des colloques de la Société des Études céliniennes.
Né en 1944 sous le signe des Gémeaux (comme Céline !), Éric eut la chance de connaître un témoin capital en la personne de Henri Mahé, dont il allait, bien des années plus tard, rééditer sa Brinquebale dans une édition particulièrement soignée et enrichie. Auparavant, par une série d’articles et de communications, il sut dire sa dette envers ce peintre et décorateur de talent qui assista à l’éclosion de l’écrivain.
La différence entre Mazet et bien d’autres céliniens, c’est qu’il se révéla un véritable chercheur, alliant humilité et rigueur. Et dépourvu du moindre souci carriériste, travaillant durant toutes ces années sur Céline, que celui-ci ait atteint le sommet de sa gloire posthume ou pas. C’est ainsi qu’il a rencontré des témoins, pris des notes, suivi des pistes, opéré mille et un recoupements, ce qui lui permettra plus tard de rédiger une foultitude d’articles publiés dans toutes les revues céliniennes existantes et même ailleurs. On lui a parfois reproché de pousser l’exactitude jusqu’aux détails infimes, mais c’est oublier que ceux-ci peuvent s’avérer révélateurs ou permettre de relier un fil à l’autre. Exigeant, il s’insurge lorsque telle entreprise de presse, surfant sur la vogue célinienne, présente un dossier truffé d’inexactitudes, de simplifications abusives ou même d’interprétations malveillantes. Il n’apprécie guère la facilité, pas davantage la doxa.
Il a fallu attendre 2004 pour qu’il co-signe un ouvrage capital : Images d’exil. Louis-Ferdinand Céline 1945-1951 (Copenhague-Korsør), véritable encyclopédie de l’exil danois. Mais si l’on rassemblait toutes les études qu’il a consacrées à Céline, on disposerait d’un volume de 500 pages au moins. Sans compter les nombreuses correspondances qu’il a présentées, annotées et parfois même révélées, de Briant à Marks en passant par Seltensperger ou Zuloaga.
Car il faudrait aussi évoquer ses nombreuses découvertes, notamment celles liées à la biographie célinienne des années décisives qu’il connaît particulièrement bien. C’est la raison pour laquelle nombreux ont été les céliniens à faire appel à lui, que ce soit pour la Pléiade ou pour des initiatives moins ambitieuses. Leur attente ne fut jamais déçue, Éric Mazet étant certainement l’un de ceux à connaître le mieux la vie et l’oeuvre du grand fauve. Une de ses autres particularités est que, contrairement à tant d’autres exégètes, il ne condamne pas l’individu mais essaie de comprendre, voire d’être en empathie. Et tente de mettre en perspective historique ce que furent les combats et motivations du pamphlétaire. Pour mieux appréhender sa vision de Céline, il faut se reporter à l’entretien qu’il a donné à Joseph Vebret : « Si l’on cherche à comprendre, sans vouloir excuser, tout est plus compliqué chez Céline que chez d’autres écrivains. Son ambivalence, ses changements, nous déroutent. ». Nul doute que l’analyse de la graphie célinienne lui a permis de corroborer cette appréciation. En 2012, Eric Mazet co-signera un monumental Dictionnaire de la correspondance. C’est dire s’il n’a pas fini d’enrichir notre connaissance de Céline.
Marc LAUDELOUT, décembre 2011.
« Éric Mazet l’asteios »
Bien sûr, vous la connaissez la phrase que l’écrivain latin Térence prête à un de ses personnages : « Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m’est étranger ». Cette déclaration, donc, pourquoi ne m’amuserais-je point à la reprendre, à en faire tout autre chose, pour la mettre dans la bouche d’Eric Mazet, lui faisant dire, à son corps défendant : - Je suis célinien, et rien de ce qui est célinien ne m’est étranger. Car, qu’il le veuille ou non, Éric Mazet figure en compagnie des Godard, Vitoux, Alméras, Laudelout et quelques autres, celui qui sait tout sur Céline. De cela tous conviennent. Et même ceux qui le citent et cherchent parfois à le prendre en défaut sur quelques erreurs sont contraints de le reconnaitre : « Éric Mazet, qui édite et annote tout cela, est un garçon étonnant. Il fait partie de ces céliniens, très pointus, qui savent tout sur le Céline d’une certaine époque et un certain milieu… » (Robert Le Blanc, article cité dans Le Bulletin Célinien, n° 334) Un garçon étonnant, certes, mais aussi touchant dans cette fidélité qui, selon moi, va bien plus loin qu’une fidélité d’ordre simplement littéraire. Céline, il l’a connu par Henri Mahé interposé (Mahé/Mazet, il y a là comme une correspondance baudelairienne !) dès l’âge de douze ans. A partir de là tout s’enchaîne : à 27 ans, un mémoire de maîtrise à la Sorbonne : La déformation du réel dans trois oeuvres de Céline ; biographe, bibliophile, corédacteur de L’année Céline, éditeur de lettres, auteurs de nombreux articles dans les revues Lire, Magazine littéraire, La presse littéraire… préfacier etc. A le fréquenter, cependant, on s’aperçoit vite qu’il ne s’est pas laissé enfermer dans cette spécialité. N’oublions pas l’amateur de musique et surtout l’amateur de peinture qu’il a découverte d’abord par son père et, bien sûr, par Henri Mahé dit Riton la barbouille. Mais pour en revenir à Céline et user d’une métaphore, nous dirons qu’Éric Mazet est à lui seul une sorte de C.D.I. vivant, un passage obligé pour tous ceux qui désirent approfondir leur connaissance de Ferdinand et de tous ceux qui l’ont approché. Alors, me direz-vous, pourquoi n’apparaît-il jamais sous les sunlights médiatiques, à la radio, aux étranges lucarnes ? Ne voyez pas dans cette absence une injustice, mais un choix revendiqué. Sa modestie a pris le parti de l’ombre, laissant aux autres les premiers plans, ce dont d’ailleurs ils s’acquittent fort bien. Quant à lui, il poursuit son oeuvre dans l’ombre. Bien creusé vieille taupe ! Voilà pour le chercheur.
Un mot de l’homme maintenant. Avenant et généreux. Dès notre première rencontre, il
m’offre l’ouvrage d’Henri Mahé : La brinquebale avec Céline, dont il a rédigé la préface,
avec cette dédicace malicieuse : Pour Serge Kanony célinien albigeois.
Célinien albigeois ? Soit ! Mais petit célinien albigeois alors !
J’accepte cette flatteuse appellation moins pour moi que pour ma ville qui apparaît par deux
fois dans les romans de Céline. N’exhibe-t-elle pas, ma ville, en son centre, une imposante
statue de bronze, celle de Galaup de la Pérouse, notre explorateur albigeois ? Bien campé sur
ses deux jambes, la tête fièrement relevée, le regard fixé sur les lointains, il tient dans sa main
droite la lorgnette qu’il avait perdue lorsque Bardamu l’aperçoit dans le ciel montmartrois
prenant le commandement des morts. Rappelez-vous :
« Ils attendaient La Pérouse, celui des îles, qui les commandait tous cette nuit-là pour le
rassemblement… Il n’en finissait pas La Pérouse de s’apprêter, à cause de sa jambe en bois
qui s’ajustait de travers… et qu’il avait toujours du mal d’abord à la mettre sa jambe en bois
et puis aussi à cause de sa grande lorgnette qu’il fallait lui retrouver »
Après la marine royale, l’église.
Nous voici à Sigmaringen. Ah, il y en a du monde dans les couloirs ou sur le palier de l’hôtel
Löwen : des Sénégalais, Clotilde, les réfugiés de Strasbourg, tous à monter l’escalier à l’assaut
des W.C… Et parmi eux…
« Un évêque, la soutane violette, le très vaste chapeau, la croix pectorale […] il s’approche,
il me fait signe qu’il veut me parler… d’où il me connaît ?
« Docteur, je suis l’évêque d’Albi ! »
-M’est avis, mon cher Éric, que vous seriez bien inspiré, dans le cadre de vos recherches,
d’enquêter du côté de l’archevêché, pour nous le retrouver, l’évêque !
Modeste et courtois, tel se présente Eric Mazet ; quelqu’un qui, loin d’étaler sa profonde
connaissance de Céline et de son oeuvre, préfère s’intéresser à son interlocuteur. Les grecs
avaient un terme intraduisible en français : asteios ; adjectif qui contient à la fois l’idée de
gentillesse, d’élégance morale et d’urbanité ; l’asteios, c’est l’homme de la ville, à l’image
d’Eric Mazet, ce parisien, un habitué du 31 rue Greuze, où il rencontra Henri Mahé, l’homme
qui avait vu l’HOMME.
J’aime beaucoup ces premières lignes où Mazet, délaissant pour un temps ses travaux
d’exégète et fendant l’armure, se laisse aller aux confidences :
« Moi j’ai connu un vrai archange au déclin de son aventure […] Il s’appelait Henri Mahé.
J’avais douze ans, il en avait quarante-neuf. Où, quand, comment ? A Paris, 31 rue Greuze,
en 1956… Quelle joie, quel enchantement, ces mercredis ! »
Après une telle rencontre, comment ne pas croiser la route de Céline ?
Oui, pour Eric Mazet, au 31 rue Greuze, « Ça a débuté comme ça. » !
Serge KANONY, avril 2012.
« Seule la recherche lui importe »
J’ai connu Eric Mazet alors qu’il habitait « la Mouffe », c’est loin tout ça. Il avait
soutenu en 1972 une thèse époustouflante sur « La Déformation du réel dans l’oeuvre de
L.-F. Céline », qui reste, aujourd’hui encore, un travail de référence. Comme l’informatique
n’existait pas, il avait créé, à la main, une multitude de références, qu’il tenait serrées dans
des classeurs. Je crois que c’est chez lui que j’ai pris l’habitude de mettre en fiches mes
petites trouvailles.
Dauphin et Godard, qui avaient bien vu la qualité de son travail, voulaient l’annexer
pour leurs entreprises éditoriales, et pour cause : si on lui demandait une notice biographique,
il apportait cinq pages, quand un autre aurait produit dix lignes. Lorsque le premier volume
des oeuvres de Céline, auquel il avait participé, est paru en Pléiade, on l’avait juste remercié
en préambule et en bas de page. J’étais fâché pour lui. Il a continué quand même à alimenter
la Pléiade et les Cahiers Céline, avec le même désintéressement. Seule la recherche lui
importe.
Alors que les « barons » céliniens ne juraient que par Gen Paul, lui avait choisi
d’approfondir la biographie d’Henri Mahé, qu’il avait bien connu. Il a bataillé seul, durant
des années, pour imposer son peintre précurseur, et tous ses amis bretons, tellement ignorés à
Paris, et qu’on découvre aujourd’hui : il m’en parlait déjà en 1975. Pas à contre-courant,
jamais à la traîne, juste devant.
Le voici peinard, mais toujours attentif et actif dans le Midi, désormais. Ah, demeurer
« loin du marécage parisien », écrivait Robert Denoël, telle est la recette pour garder son âme
intacte. Je suis donc tranquille pour lui.
Eric Mazet, mon pote, lauréat du premier « Céline d’Or » ?
Henri THYSSENS, décembre 2011.
A lire :
Vache ! pour une surprise, c'est une surprise ! cela effraie un peu... j'espère que cela ne portera pas malheur... ça sent un peu la nécro ces louages ! et je suis encore bien vivant... J'ai encore deux trois choses à dire, deux pistes à suivre... Rien n'est jamais fini... Et puis d'autres ont pris le relai, et des plus rigoureux, tout en étant modestes... Mais que de gentils propos ! Merci à tous quatre ! C'est un drôle d'effet de se voir tendu un miroir où on ne se reconnaît pas tout à fait... "C'est moi, ça, t'es bien sûr ?" Quelques mots en réponse... Je n'écrirai jamais de biographie, parce que toute biographie, aussi passionnante soit-elle, est forcément réductrice, aussi neutre soit-elle est forcément subjective. Je préfère les grands plans successifs sur de courts moments au cinéma panoramique. Ou alors il faudrait trois écrans : l'un pour l'homme, le second pour l'époque, celui là géant, le troisième pour son art. Et pour ces trois comme pour le dernier, méthode Abel Gance, de la superposition et kaléidoscope : d'une décennie à l'autre, on n'étudie plus un écrivain de la même façon. Il y a tant de manière de lire Céline, tant d'étages différents ! Un arc en ciel du réalisme au mysticisme. Dans dix ans, notre manière d'aborder Céline, paraîtra peut-être complètement obsolète, comme la manière de lire Flaubert au début du XXe siècle nous paraît naïve aujourd'hui. J'ai fais ce que j'ai pu et d'autres feront mieux. Il suffit d'être un peu curieux et ouvert à tout. Mon plaisir fut de rencontrer Henri, Marc, Émile, Serge, qui m'ont enrichi humainement et littérairement. Mon plaisir fut les rencontres céliniennes, des célébrités aux sans grade. Ce fut un beau voyage, une belle aventure. Et ce n'est pas fini ! Y a encore du boulot ! Plus qu'on ne l'imagine. La preuve, cette dernière rencontre à Gaillac, dans le Tarn, grâce à un bouquiniste ambulant, de Serge Kakony qui m'apporte une nouvelle lecture de Céline... Et puis, et puis, grâce à Internet, la rencontre de mon interviewer pour le Petit célinien... un jeune enthousiaste et méticuleux que je ne verrai peut-être jamais... "Le destin et le hasard tiennent l'homme par la main et il ne les voit pas" : une phrase de Maeterlinck citée par Céline...
RépondreSupprimerM. MAZET bonjour j'ai eu la chance d’être l'une de vos élèves au collège Saint Nicolas (2001_2002) . A cette époque déjà vous nous avez transmis l’amour de le littérature .Maintenant adulte je vous remercie de votre enseignement .
SupprimerLa phrase exacte de Maeterlinck, extraite de « La Sagesse et la destinée » (1908) est plus troublante encore : « Il existe des rapports incessants entre l'instinct et le destin, ils se soutiennent l'un l'autre, et ils rôdent la main dans la main autour de l'homme inattentif. »
RépondreSupprimerVa ton chemin et ne te soucie pas des nécros. C'est juste un hommage mérité.
Ah ! merci ! Je citais de mémoire... Je rentre aussitôt la citation exacte et sa référence dans ma fiche "Maeterlinck et Céline" pour la comparer avec la citation écrite de mémoire par Céline à Paraz le 6 février 50 : “C’est Maeterlinck (oh celui-là drôlement fakir !) qui écrit : “Le Hasard et la Destinée se promènent la main dans la main autour de l’homme inattentif...” Céline et Maeterlinck... le derviche et le "fakir"... Encore une piste inexplorée... "Mon don était la légende, je l'ai plié au réalisme par haine de la cruauté des hommes": je cite hélas encore de mémoire cette phrase de Céline qui me paraît capitale.
RépondreSupprimer...Hommage mérité, c'est bien le mot. Bien des choses, plus personnelles, eussent pu être dites. Nos visites chez Eliane Bonabel, Robert Poulet ou chez les locataires de l'appartement rue Girardon, les "Journées Céline" et les sympathiques dîners qui s'ensuivirent, tant de souvenirs !... Sans oublier son hospitalité à Issy-les-Moulineaux. Le paradoxe étant que l'introverti Mazet peut être le plus chaleureux, si fidèle en amitié. J'arrête là, pas la peine de le faire rougir...
RépondreSupprimerM. L.
Bravo pour votre entretien (+ la bibliographie) qui permet de mettre enfin la lumière sur l'infatigable Monsieur Éric Mazet, travailleur de l'ombre, aussi discret que tenace prospecteur au service de LFC et d'Henri Mahé ! Le maître de tous les céliniens.
RépondreSupprimerOlivier Jacquot
Merci ! c'est gentil ! mais je ne sais pas du tout "tout sur Céline" ! heureusement d'ailleurs, sinon je m'ennuierais... et je ne suis pas le maître de tous les céliniens ! d'aucun même ! Eric Mazet
SupprimerL’occasion est trop belle : ta citation « célinienne » de Maeterlinck est représentative de toutes les citations de Céline, qui sont systématiquement approximatives. Dans sa correspondance Céline cite énormément d’auteurs dont les titres et les textes ne sont jamais textuels. Mais Céline va toujours au fond, au « trognon » : il en a saisi l’essentiel, comme dans le domaine psychanalytique. Cette incapacité de citer textuellement pose question. Je suppose que tu as un début de réponse.
RépondreSupprimerCela dit, dans l’exemple du livre de Maeterlinck, une autre question se pose : Céline en a-t-il bien saisi le fond ? Dans sa lettre à Paraz du 6 février 1950 il écrit, en effet : « C’est Maeterlinck (oh celui-là drôlement fakir !) qui écrit : “Le Hasard et la Destinée se promènent la main dans la main autour de l’homme inattentif...”
Maeterlinck a écrit : « Il existe des rapports incessants entre l'instinct et le destin, ils se soutiennent l'un l'autre, et ils rôdent la main dans la main autour de l'homme inattentif. »
« Instinct et destin » et « hasard et destin » ne veulent pas dire la même chose ! Céline paraît avoir retenu l’image, qui est forte, de l’homme inattentif autour duquel tout se joue à son insu. Mais, quand au fond ?
Bonne question - que je me posais. Exactement. N'ai pas encore de réponse. Laisse moi le temps de la réflexion.
SupprimerNon, la toute première fois, ce fut devant le casier du boutiquier Bernot sur le quai de la Seine... l'Amiral... qui parlait de Chopin et de Jo Privat qui a fait graver sur son urne de cendres : "Un dur à cuir"... Encore de bons souvenirs !.. Il suffit de fermer les yeux... Ils sont tous là... Monnier et son épouse, Marc et toi... et puis, à Cannes, près du vieux port, ce dîner avec Jacques Marin. Mais "le meilleur" : non ! non ! J'en connais au moins un qui en sait plus que moi. Un plus jeune, plus précis, plus tenace, et qui ne se la joue pas. "Poétique et non politique", l'oeuvre de Céline, ça oui, je maintiens, persiste. Tout est là.Il a été entraîné, forcé à s'abaisser à répondre politiquement, à descendre dans l'arène politique, mais pour montrer le vol de l'alouette.
SupprimerEric Mazet, je l’ai rencontré pour la première fois aux « Journées Céline » à Paris. Entre Pierre Monnier, Marc Laudelout et lui, je me sentais bien « léger » quand, au restaurant qui nous réunissait le soir, les faits , gestes et œuvres du grand fauve étaient évoqués…
RépondreSupprimerQuelle érudition ! , quel chercheur ! , quel découvreur ! et quel talent !... Et par-dessus le marché, quelle modestie et quelle hauteur morale à la fois !...
Je le revois en bas de la France cette fois. Il riait de bon cœur, un soir, à Cannes, attablés à la terrasse d’une grande brasserie, Marc, Pierre et Renée et deux amis écoutions tous les anecdotes de l’acteur Jacques Marin qui se succédaient. La foule, grouillante et curieuse l’ayant reconnu, s’était agglutinée autour de nous et bloquait presque la circulation de la rue… Evocations céliniennes…
Le meilleur ? Eric ?... Qui le conteste ? « Poétique et non politique… » J’ai retenu… Merci Eric.
M.M.
André Bernot, bouquiniste des bords de Seine, voilà un phénomène ! Excellent musicien (il accompagna Jacques Dutronc à l’accordéon durant des années) et grand lecteur célinien : je crois bien qu’il pourrait citer le « Voyage » à l’envers ! Et collectionneur : il possède toute son oeuvre sur des papiers de choix, et une veste de mouton ayant appartenu à l’écrivain ! A ma connaissance, il n’a qu’une aversion : Jean-Paul Sartre, coupable d’avoir écrit une phrase déshonorante à une époque où elle pouvait faire du mal. Aux chiottes donc, le ténia ! Et il le dit sans ambages à ses visiteurs, à deux pas du Café de Flore ! Faut être osé.
RépondreSupprimerEric Mazet fut mon professeur de français et de latin au collège Saint Nicolas d'Issy-les-Moulineaux. Je m'en souviens encore 30 ans plus tard.
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