Cette préface a été écrite pour la première réédition de Voyage au bout de la nuit réalisée après 1944 par C. Frémanger, sous la bannière des éditions Froissart domiciliées pour la circonstance à Bruxelles. L'achevé d'imprimer est de juin 1949. La préface a depuis été reproduite, sans indication de date ni d'origine, dans toutes les éditions de Voyage au bout de la nuit.
Ah ! on remet le Voyage en route.
Ça me fait un effet.
Il s'est passé beaucoup de choses depuis quatorze ans...
Si j'étais pas tellement contraint, obligé pour gagné ma vie, je vous le dis tout de suite, je supprimerais tout. Je laisserais pas passer plus une ligne.
Tout est mal pris. J'ai trop fait naître de malfaisances.
Regardez un peu le nombre des morts, des haines autour... ces perfidies... le genre de cloaque que ça donne... ces monstres...
Ah, il faut être aveugle et sourd !
Vous me direz : mais c'est pas le Voyage ! Vos crimes là que vous en crevez, c'est rien à faire ! c'est votre malédiction vous-même ! votre Bagatelles ! vos ignominies pataquès ! votre scélératesse imageuse, bouffonneuse ! La justice vous arquinque ? Zigoto !
Ah mille grâces ! mille grâces ! Je m'enfure ! furerie ! pantèle ! bomine ! Tartufes ! Salsifis ! Vous m'errerez pas ! C'est pour le Voyage qu'on me cherche ! Sous la hache, je l'hurle ! c'est le compte entre moi et "Eux" ! au tout profond... pas racontable... On est en pétard de Mystique ! Quelle histoire !
Si j'étais pas tellement contraint, obligé pour gagner ma vie, je vous le dis tout de suite, je supprimerais tout. J'ai fait un hommage aux chacals !... Je veux !... Aimable !... Le don d'avance... "Denier à Dieu" !... Je me suis débarrassé de la Chance... dès 36... aux bourrelles ! Procures ! Roblots !... Un, deux, trois livres admirables à m'égorger ! Et que je geigne ! J'ai fait le don ! J'ai été charitable, voilà !
Le monde des intentions m'amuse... m'amusait... il ne m'amuse plus.
Si j'étais pas tellement astreint, contraint, je supprimerais tout... surtout le Voyage... Le seul livre vraiment méchant de tous mes livres c'est le Voyage... Je me comprends... Le fonds sensible...
Tout va reprendre ! ce Sarabbath ! Vous entendrez siffler d'en haut, de loin, de lieux sans noms : des mots, des ordres...
Vous verrez un peu ces manèges !... Vous me direz...
Ah, n'allez pas croire que je joue ! Je ne joue plus... je suis même plus aimable.
Si j'étais là tout astreint, comme debout, le dos contre quelque chose... je supprimerais tout.
Louis-Ferdinand Céline, Préface à une réédition de Voyage au bout de la nuit, 1949, Pléiade p.1113.
Ah ! on remet le Voyage en route.
Ça me fait un effet.
Il s'est passé beaucoup de choses depuis quatorze ans...
Si j'étais pas tellement contraint, obligé pour gagné ma vie, je vous le dis tout de suite, je supprimerais tout. Je laisserais pas passer plus une ligne.
Tout est mal pris. J'ai trop fait naître de malfaisances.
Regardez un peu le nombre des morts, des haines autour... ces perfidies... le genre de cloaque que ça donne... ces monstres...
Ah, il faut être aveugle et sourd !
Vous me direz : mais c'est pas le Voyage ! Vos crimes là que vous en crevez, c'est rien à faire ! c'est votre malédiction vous-même ! votre Bagatelles ! vos ignominies pataquès ! votre scélératesse imageuse, bouffonneuse ! La justice vous arquinque ? Zigoto !
Ah mille grâces ! mille grâces ! Je m'enfure ! furerie ! pantèle ! bomine ! Tartufes ! Salsifis ! Vous m'errerez pas ! C'est pour le Voyage qu'on me cherche ! Sous la hache, je l'hurle ! c'est le compte entre moi et "Eux" ! au tout profond... pas racontable... On est en pétard de Mystique ! Quelle histoire !
Si j'étais pas tellement contraint, obligé pour gagner ma vie, je vous le dis tout de suite, je supprimerais tout. J'ai fait un hommage aux chacals !... Je veux !... Aimable !... Le don d'avance... "Denier à Dieu" !... Je me suis débarrassé de la Chance... dès 36... aux bourrelles ! Procures ! Roblots !... Un, deux, trois livres admirables à m'égorger ! Et que je geigne ! J'ai fait le don ! J'ai été charitable, voilà !
Le monde des intentions m'amuse... m'amusait... il ne m'amuse plus.
Si j'étais pas tellement astreint, contraint, je supprimerais tout... surtout le Voyage... Le seul livre vraiment méchant de tous mes livres c'est le Voyage... Je me comprends... Le fonds sensible...
Tout va reprendre ! ce Sarabbath ! Vous entendrez siffler d'en haut, de loin, de lieux sans noms : des mots, des ordres...
Vous verrez un peu ces manèges !... Vous me direz...
Ah, n'allez pas croire que je joue ! Je ne joue plus... je suis même plus aimable.
Si j'étais là tout astreint, comme debout, le dos contre quelque chose... je supprimerais tout.
Louis-Ferdinand Céline, Préface à une réédition de Voyage au bout de la nuit, 1949, Pléiade p.1113.
aaaah mon cher Ferdinand,
RépondreSupprimeril parle et il dis toujours des mots pareils...
j'adore.
la société Denoël avait porté plainte en contrefaçon contre la réédition Froissart de Voyage.
RépondreSupprimerlettre à Albert Paraz 17 octobre 1947 :
il n'a jamais été question à ma connaissance de rééditer Bagatelles. mais les journaux tous tendancieux et provocateurs à ravir l'ajoutent au Voyage pour ameuter les chacals! le Voyage seul n'attirait pas les haines, les vengeurs les assassins qu'il faut... tandis qu'en ajoutant Bagatelles ils relancent à la curée! ils font plaisir à leur clientèle.
plus bas, plus menteurs, plus lâches. leur grande lessive.
Préface à mon édition de poche du Voyage au bout de la nuit, cette mise en abîme, petite variation de fin du monde aux accents prophétiques, a été ma première lecture de Louis-Ferdinand Céline. J'étais au lycée et pas le moins du monde préparé à de tels bouleversements. Je me suis alors dit que plus rien ne serait comme avant. J'avais, insensiblement, franchi le Rubicon.
RépondreSupprimerE C-G
A lire en écoutant Thelonious Monk! La même façon de se mettre en danger, toujours sur le fil...
RépondreSupprimerCéline, lui, écoutait Chopin, un pianiste, bien oublié maintenant, d'avant Monk...
RépondreSupprimer"Celine, lui, ecoutais Chopin"... Quel commentaire ridicule ...
SupprimerAssurdo. Ho letto una vecchia edizione con questa prefazione dove Celine evoca Bagatelles uscito dopo.
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